Depuis l’élection présidentielle de François Hollande, la planète Internet était dans l’attente d’une décision à l’égard de la Haute Autorité qui fut tellement décriée durant la précédente mandature. Ainsi le candidat Hollande avait « clairement » fait connaître son intention de mettre un terme à l’Hadopi afin de le remplacer par un système plus juste et équitable. Une déclaration dont l’opposition s’était gaussée, estimant que si la gauche parvenait au pouvoir, rien ne serait fait dans ce sens. Aujourd’hui difficile de continuer à faire l’autruche, et il semble bien que la loi Hadopi profite encore de belles journées, au moins pour l’année 2012, voire le début 2013.
Le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, a précisé mardi, face aux députés, que le texte appelé à prendre la suite d’Hadopi sera adopté au mieux d’ici un an, et qu’il « conciliera la défense des droits des créateurs et un accès aux œuvres par internet facilité et sécurisé. Il ne peut y avoir de redressement sans projet culturel. Mon gouvernement soutiendra la création et la diffusion sur tout le territoire, en lien avec les collectivités locales, dont je tiens à saluer l’engagement souvent exemplaire. Je proposerai au Parlement, au cours du premier semestre 2013, une loi d’orientation sur la création et le spectacle vivant. ».
Reste que pour l’heure, il est encore question d’une énième « mission de concertation » conduite cette fois par Pierre Lescure, ancien patron de Canal+, à la demande d’Aurélie Filipetti. Plus question donc d’abroger la loi Hadopi pour le moment, ce qui offre une fenêtre de tir idéale à tous ses partisans, Pascal Nègre (Universal) ouvrant le feu et exprimant son envie de voir les autorités « foutre un coup sur la gueule » des monstrueux pirates récidivistes qui semblent hermétiques aux courriers de mise en garde de la Haute Autorité. « Il s’est passé ce que l’on avait dit depuis le départ : sur un million d’e-mails envoyés, 95% des gens arrêtent, explique Pascal Nègre. Sur ceux qui remettent ça, (après) la centaine de milliers de lettres recommandées, à nouveau 90% arrêtent ». D’autres semblent vivre en pleine féérie à l’image de Nicolas Seydoux, Président de Gaumont, qui affirme que « entre le 15 mai et le 15 décembre 2011, aucun film français n’ a été téléchargé sur le web ».
Dès lors, et au regard de tout ceci, une question s’impose immédiatement : si l’Hadopi a fait la démonstration de son efficacité pour la plupart des observateurs avertis, et même si des sanctions supplémentaires sont réclamées par certains, pourrions-nous avoir les chiffres de fréquentation dans les cinémas, ainsi que ceux des ventes de DVD, Blu-Ray et CD afin de constater s’il y a bien un lien entre le piratage et les chiffres de vente ? Rappelons que la plupart des études réalisées sur ce point démontrent que le rapport entre les deux est loin d’être évident. Mais une fois que tous les pirates seront en prison, que l’Internet ne sera plus accessible chez les particuliers en l’absence d’un logiciel de contrôle total, et que la culture sera devenue un luxe, il faudra trouver d’autres boucs émissaires pour expliquer les difficultés d’un secteur… (moi je dirais les rôlistes…) D’ici là, le gouvernement prend le temps de la concertation, ce qui se traduit généralement par une longue période sans fin, ni but, autre que celui d’entretenir le mythe d’une possible modification. Alors l’Hadopi en fin de course ? En phase de réajustement ? Ou définitivement installée ?