Au moment où Mega arrive sur la scène du partage (même si les conditions d’utilisation limitent la diffusion d’un fichier), voilà que le débat sur la fameuse « riposte graduée » refait surface. Ainsi de nombreuses voix, dont celles des producteurs indépendants, réclament que la sanction qui entraîne une coupure d’accès à Internet soit remplacée par une contravention automatique de 140 €. Une solution loin de faire l’unanimité étant donné qu’elle pourrait devenir un passe-droit pour ceux qui peuvent payer sans peine cette somme, mais se révéler dramatique pour les plus modestes. S’ajoutent que cette sanction semble disproportionnée et encore une fois en totale décalage avec le nouveau paradigme incarné par Internet.
Vouloir absolument sanctionner ceux qui piratent un film ou 3 chansons sur le réseau est une posture simplement illusoire, inutile et sans doute un peu réactionnaire. Les internautes ne feront pas marche arrière, les futures générations n’adopteront pas un mode de consommation et de vente obsolète, et le mensonge selon lequel le piratage est la cause principale et première de la « crise du disque et du cinéma » ne survivra pas à la réalité économique. Jamais le cinéma ne s’est porté aussi bien en France avec des entrées records en salles. Si les disques physiques se vendent moins (ce qui explique les difficultés des Virgin, Fnac & Co), c’est au profit du tout dématérialisé qui se révèle beaucoup plus rentable pour tout le monde. Un album vendu 15 € sur une plateforme de téléchargement n’englobe plus dans son prix le coût de fabrication de la galette et du boitier, le prix du transport, du stockage et des nombreux intermédiaires. C’est presque une vente du producteur au consommateur, dont des bénéfices plus importants, surtout lorsqu’un titre est acheté 1 € à l’unité.
Et on peut étendre ce raisonnement à d’autres secteurs. Le livre va mal ? Est-ce vraiment la faute au téléchargement ou aux e-books ? La presse va mal ? N’est-ce pas parce que les gens ont pris l’habitude de s’informer sur Internet ? Dans tous ces cas il est surtout question d’une nouvelle manière de « consommer » du produit culturel en opposition avec ce qui était. Vouloir mettre en place une sanction automatique sera aussi inutile que l’était la menace de la fermeture d’accès. Mais cela permet au moins de faire avancer le débat pour qu’un jour peut-être nous abordions la vraie question : comment marier les intérêts de chacun avec la réalité technologique et sociale du moment ?