On a beaucoup parlé de Breivik. Fou, pas fou ? C’est la question clé du procès. Mais avant d’être fou, ou de ne pas l’être, Breivik est avant tout un lâche, de son acte initial jusqu’à sa défense.
La tuerie. 77 personnes désarmées mortes dans l’explosion ou par balles. Sans commentaire.
Mais tout dans sa défense consiste à le faire passer pour un déséquilibré. Le simple fait de dire qu’il veut être reconnu comme pénalement responsable – avec un tel nombre de victimes – ne fait traverser qu’une seule idée au commun des mortels : ce type est dingue. Ce n’est que de la stratégie, comme ce salut fasciste ou son regret de ne pas avoir tué plus.
Et puis les jeux vidéo ont été invités dans le débat. Là, Breivik a eu la main lourde : il s’est entrainé sur Modern Warfare a déclaré jouer plus de quinze heures par jour à World of Warcraft. S’entrainer sur Modern Warfare ? On croit rêver. Comme si un jeu quelconque, même le plus réaliste, pouvait simuler quelque chose de ce genre. Le plus curieux, c’est que les jeux d’Acti sont loin d’être les plus réalistes ; mais je pense que ce name-dropping de titres n’est pas vraiment anodin. J’y reviendrai.
Ensuite, World of Warcraft a bon dos. On voit le dessein du tueur : faire comprendre à quel point le jeu l’a désocialisé. Parce que tout le monde est déjà tombé sur un article évoquant l’addiction à WOW, un reportage. Breivik sait tout ça et la meilleure preuve, c’est que les deux jeux cités en premier sont MW et WOW. Les deux jeux les plus vendus au monde. Oui, Breivik y a joué. Mais dans son manifeste, il expliquait déjà sa défense. Cela disait en substance que si vous êtes accusé d’un comportement déviant, répondez que vous jouez aux jeux vidéo. C’est exactement ce qu’il cherche à faire en ce moment.
Breivik est donc un lâche jusque dans sa défense car il fait tout pour chercher les circonstances atténuantes ou passer pour fou. Disons le tout net : la défense tient la route. Oui, il peut passer pour un taré face au commun des mortels. À quelques petits détails près. Le choix des jeux mis « en avant » : cela prouve qu’il veut interpeler sur les jeux les plus célèbres, ce n’est pas un hasard. Mais si on revient sur ces lignes de son manifeste, on comprend que tout est prémédité. Parfaitement calculé. Et là, on entrevoit tout autre chose : la lucidité ; difficile après de passer pour un taré.
