Lomo’Instant : la photographie instantanée par Lomography

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Dépassée la photo instantanée ? Pas vraiment. Alors que le fabricant branché d’appareils photos argentiques vintage Lomography lance une page de crowdfunding pour financer le développement d’un modèle instantané, il espère récolter 100 000$. En 24h, il en amassera 350 000$ et plus d’un million au final sur toute la durée de la campagne. Voici le fruit de leur travail.

Le Lomo’Instant n’est clairement pas dans l’air du temps, du moins en apparence. Il s’adresse avant tout à une clientèle qui veut du vintage, et qui est prête à investir, non pas beaucoup d’argent, mais beaucoup de temps dans la maîtrise d’un appareil d’un autre âge, mais néanmoins attachant. Pour les malheureux qui ne connaissent pas encore Lomography, il s’agit d’une enseigne qui a fait de la photographie rétro et pas trop chère un véritable mode de vie. Loin de la photo d’ÂÂÂaaaart, où il est de bon ton de claquer 25 000 euros de matériel pour aller photographier des poulettes en sou- vêtement dans des usines d’armement désaffectées de Biélorussie, où il est communément admis qu’il faut faire la gueule pour être pris au sérieux en déambulant nonchalamment dans une expo photo d’avant-garde sur le thème : StormTrooper et sadomasochisme dans une cave de l’ancien Berlin Est, loin de tout cela donc, Lomography s’adresse à une clientèle qui se fait de plus en plus rare : celle des gens qui font de la photo pour se marrer, quitte à ne pas obtenir LA qualité ultime au tirage. Alors oui c’est bobo, oui c’est hipster à mort, mais pendant le temps que vous râlez et raillez, ces gens se marrent avec des appareils déglingués, comme les fameux Holgas, conçus à Hong-Kong en 1982, déjà dépassés à l’époque et qu’il faut rafistoler de temps en temps à coup de scotch parce que la lumière fuit dans certains boîtiers en plastoc.

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Pour le développement du Lomo’Instant, Lomography est allé chercher du pognon auprès du seul institut financier qui a encore gardé un semblant de bon sens : ses propres clients. Il a donc lancé une campagne Kickstarter avec le succès que l’on connait. D’ailleurs, la marque n’en est pas à son coup d’essai, puisqu’elle avait déjà fait appel à la plateforme de Crowdfunding pour ressusciter une optique portrait Petzval. Cette optique à fût de laiton du XIXème siècle offre une qualité de bokeh unique tout en conférant à votre Canon dernier cri un petit côté steam-punk qui pourrait bien vous permettre de « pécho » cet été au festival Hellfest. Là encore, ce fut un succès phénoménal, avec près de 1,4 M$ de récolté au lieu des 100 000$ demandés originellement. Bref, si Lomography se veut vintage, l’enseigne est résolument ancré dans le XXIème siècle quand il s’agit de financer ces développements.

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Un bien étrange appareil

Le Lomo’instant que nous avons reçu dispose d’une livrée similicuir noir. Si la qualité d’assemblage semble au rendez-vous, l’appareil est volumineux, étrangement léger, et à la prise en main, n’inspire pas une confiance immédiate.

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Le revêtement est clairement trop fragile et après deux semaines à traîner dans mon sac, il y a quand même quelques griffes çà et là. Si on le compare à un Fuji Instax Mini 90, la juxtaposition ne tourne pas en faveur du Lomo’Instant, c’est indéniable.

Par contre, à la prise en main, c’est une autre histoire. Le viseur est bien plus clair et dégagé que sur l’Instax. Sur la face avant, on trouve un flash relativement puissant, un miroir (mais personne ne fait plus de selfie, c’est trop mainstream), une molette de compensation d’exposition (on y reviendra) et une optique grand angle 27mm équivalente.

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On pourra regretter que Lomography ait choisi de positionner des boutons un peu partout sur l’appareil. Il y a en même en dessous !

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Sur le côté gauche (ou droit, selon comment on regarde l’appareil), on trouve le bouton pour l’exposition multiple. Nous y reviendrons. On trouve surtout une autre tirette permettant de changer la zone de mise au point et pour les portraits, c’est très intéressant. En effet, en portait, on a obtenus de bien meilleurs résultats qu’avec notre Fuji Instax Mini 90. L’optique est plus nette mais il faut se rapprocher de son sujet compte tenu du grand angle.

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Au dos, sans grande surprise, on trouve la trappe de chargement des cartouches Instax et un compartiment pour des piles standards, ce qui est un excellent choix dans les deux cas : les cartouches instax mini sont relativement bon marché et les piles ne seront pas obsolètes de sitôt !

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Le prix des cartouches Instax est bien sûr à prendre en considération. Il faut compter entre 8 et 10 euros le jeu de 10 images, au format carte de crédit.

Le plein d’accessoire

Le Lomo’instant n’est pas compatible avec les autres objectifs vendus par l’enseigne. Par contre, on trouve, dans les kits avancés, une flopée d’accessoire vraiment marrant. On trouve par exemple une série de filtre pour colorer le flash. On trouve trois objectifs différents : un portrait, un macro et un fish-eye.

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La qualité de fabrication de ses lentilles de conversion a de quoi surprendre, pour ne pas dire choquer l’amateur d’appareils photo : tout est en plastique, y compris le pas de vis. Mais c’est bon marché et plutôt fun à utiliser… enfin… quand c’est utilisable.

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En effet, toutes les optiques ne sont pas vraiment exploitables, ou alors il faut beaucoup de lumière. La plus intéressante reste l’optique portrait :

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Ça fonctionne bien, MAIS, il faut être en extérieur. En effet, et c’est la principale limitation de l’appareil, sa vitesse est fixée à 1/125s. Du coup, avec des optiques qui n’ouvrent pas très grand, il faut beaucoup de lumière ! L’appareil dispose d’une molette d’ajustement de l’ouverture, mais, soyons franc, elle varie entre f/8 et f/32, autant dire qu’il faut quand même beaucoup de lumière pour imprimer correctement l’imagette.

On peut aussi essayer le flash, mais combinée au zoom offert par l’optique portrait, ça ne fonctionne pas super bien. Le flash est violent et éclaire très peu d’arrière-plan.

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On n’a pas pu essayer l’optique macro (pas eu le temps), par contre, on a tenté quelque chose avec le fish-eye.

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Autant le dire franchement, l’optique Fish-Eye n’a aucun intérêt.

Une bonne optique de base

Par contre, l’optique intégrée est tout bonnement excellente (compte tenu des circonstances) et à 27mm, on peut commencer à faire des portraits sympas.

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Pour ce faire, on s’est mis à la fenêtre un soir et on a compensé l’exposition (et donc l’ouverture sur cet appareil, à +2). Voici un autre exemple, un peu plus tard, un peu plus sombre :

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Dans l’ensemble, ces résultats sont très satisfaisants, avec une belle netteté et une tonalité correcte.

Un appareil difficile à apprivoiser

A cause de cette vitesse fixe, il est vraiment difficile au début d’utiliser l’appareil. Certes, vous pouvez passer en mode Bulb, mais là, c’est vous qui décidez du temps d’exposition, de façon pifométrique. Et bon, on n’a pas trop eu de succès :

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Mais avec un peu de temps, pour les paysages, on arrive à s’en sortir et on obtient des résultats plutôt sympas :

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L’exposition multiple

En cliquant sur le bouton MX, on peut faire jouer cette sous exposition chronique de l’appareil en notre faveur.

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Mais surtout, on peut utiliser un petit accessoire rigolo : le Splitzer

Le Splitzer permet d’occulter une partie de l’image. Donc sans exposition multiple, ça ne sert à rien :

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Par contre, vous pouvez vous en servir pour composer des scènes sympas en changeant l’occultation entre deux prises ! Attention, ce n’est pas facile et il vaut mieux ne pas trop bouger. Idéalement, montez l’appareil sur un trépied pour être certain de garder la même position.

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Le Splitzer permet d’exposer l’image quart par quart si vous voulez. C’est plutôt sympa.

Lomo’Instant : assurément un bon appareil

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Le Lomo’Instant ne ressemble à aucun autre. Certes, il est gros, il semble trop léger, et son revêtement ferait passer l’intérieur d’une traban pour une édition spéciale grand luxe d’une Bugatti Veyron. Mais son optique est vraiment meilleure que celle de l’instax Mini 90 de Fuji. L’engin est beaucoup plus rustique aussi : il ne mesure pas l’exposition pour vous et vous devrez vous fier à votre instinct ou faire confiance au flash. Du coup, au début, on rate. Beaucoup. Il nous a fallu au moins une cartouche d’essais divers pour trouver un point de fonctionnement correct en intérieur et en extérieur. Et pour chaque lentille, il faut retrouver ses marques. D’ailleurs à ce propos, on ne peut vraiment vous conseiller que l’optique portrait, très sympa en extérieur.

L’appareil toute option coûte 160 euros. C’est beaucoup, mais en même temps, vous en avez quand même pour votre argent même si tout est en plastique. Personnellement, j’opterai plus certainement pour un modèle de base à 100 euros (ou 120 euros, si étrangement vous voulez l’édition en faux cuir marron plutôt que le faux cuir noir ou le blanc). En effet, l’optique intégrée est vraiment bonne. Elle permet des portraits tout à fait sympas à 27mm et reste efficace pour les paysages.

A cela s’ajoute aussi le fait que les cartouches Instax sont stables, fiables, et largement disponibles pour moins d’un euro le cliché. A comparer aux 2 euros des Impossibles Projects, au développement lent et au triage aléatoire. Bref, le Lomo’Instant est une vraie solution photographique crédible à défaut d’être sérieuse : c’est un appareil photo pour se marrer et on vous le recommande… mais vous êtes prévenu, ça ne sera pas de la tarte au début.

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