Partager la publication "Ultra-HD et très haute résolution: retour au n’importe quoi ?"
De temps à autre, une définition d’image s’impose comme un standard, assurant une compatibilité absolue, de la capture d’image à l’écran en passant par le format d’enregistrement et le lecteur multimédia. C’était le cas du Full-HD. Mais ce standard de fait est sur le point de basculer et ce n’est pas la conversion récente de l’appellation « 4k » en Ultra-HD qui va clarifier les choses. Ere-numérique fait le point sur ces appareils qui vous promettent plus que le Full-HD.
Quand vous achetez un téléviseur, vous ne vous posez sans doute même plus la question. Bien évidemment, il s’agira d’un écran Full-HD. C’est à dire qu’il offrira une résolution de 1920 x 1080 pixels, au format 16 :9. Et quand vous brancherez votre lecteur Blu-ray sur cet écran, vous ne vous poserez plus la question de savoir si la connectique peut transférer l’image contenue sur le disque vers l’écran sans encombre. Et c’est bien normal, tous ces appareils sont faits pour fonctionner ensemble, autour d’un format clairement défini : le Full-HD. On a vite oublié la période sombre du fameux « HD-ready » qui voulait tout dire et son contraire. C’était un véritable casse-tête. Vous trouviez en rayon des écrans HD-ready offrant une résolution de 1280 x 720, mais aussi 1366 x 768. Et au rayon plasma, c’était le grand n’importe quoi puisque les constructeurs proposaient des écrans 16/9ème comportant 1024×768 pixels ce qui correspond en principe à un format d’image 4/3 ! Les constructeurs avaient surmonté l’écueil en proposant des pixels rectangulaires et non plus carrés ! Bonjour la remise à l’échelle ! Quant aux caméscopes et autres appareils photo, c’était le folklore absolu. On trouvait du 720p, mais aussi de 576i, du 800 x 600, du 1024 x 768, entrelacé, pas entrelacé, au petit bonheur la chance… C’était un vrai casse-tête de faire fonctionner tout ce petit monde ensemble, l’angoisse à chaque branchement de câble. Et si vous pensiez que cette époque est définitivement passée, détrompez-vous.
Au delà du Full-HD, l’informatique en pointe
La standardisation d’une résolution est toujours un casse-tête. D’un côté, les fournisseurs de contenu filment et produisent dans des résolutions très élevées. Une caméra de Cinéma Red One dispose de plus de 10 Mpixels par exemple. Oui mais voilà, rien ne permet aujourd’hui de commercialiser des films dans cette résolution auprès du grand public. Du côté des constructeurs de matériel, on est aussi dans l’expectative. La technologie permet de fabriquer des écrans de toute taille de résolution supérieure au Full-HD. Mais quel est l’intérêt s’il n’y a rien à regarder dessus ? C’est encore et toujours l’histoire de la poule et de l’œuf… Et comme d’habitude dans ces conditions, ce sont les geeks et les primo-utilisateurs qui montrent la voie.
En effet, c’est dans ce domaine que l’on trouve le plus d’appareils haute résolution, à commencer par les moniteurs informatiques. Cela fait plusieurs années que l’industrie de l’affichage informatique plafonne péniblement à une résolution de 1 920 x 1 080 points, ou 1920 x 1200 points, dans le meilleur des cas, et pour la majorité de ceux qui souhaitent acheter un nouvel écran. Mais c’est sur le point de changer. On assiste désormais à une relative démocratisation des écrans WQHD, offrant une résolution de 2 560 x 1 440. Il n’y a qu’à voir le test récent du Viewsonic VP2770-LED par exemple. Ils sont restés longtemps sur les étals sans trouver preneurs, en raison notamment de leur prix de vente, supérieur à 1200 euros jusqu’au début de cette année. Désormais, plusieurs marques commercialisent ces écrans dès 750 euros. Certes, c’est toujours beaucoup d’argent pour un 27 pouces, mais l’essayer c’est l’adopter. D’ailleurs les ordinateurs tout-en-un s’y mettent aussi et il faut rendre ici hommage à Apple qui a dégainé le premier avec un 27 pouces WQHD originellement commercialisé à 1500 euros, mais qui a pris de l’embonpoint aujourd’hui à 1650 euros. La résolution de ces appareils est supérieure au Full-HD, mais on n’est pas encore au niveau de l’Ultra-HD.
Des appellations en veux-tu en voilà !
On va droit vers une nouvelle période sombre d’appellation marketo-marketing sous couvert de technologie d’affichage. Voici un petit florilège des appellations auxquelles vous serez confrontés sous peu, si ce n’est pas déjà le cas :
Ultra-HD
C’est la dénomination choisie récemment pour commercialiser les nouveaux écrans présentant une résolution de 3 840 x 2 160 pixels. Avec un peu de chance, on éviter le spectre du Ultra-HD-ready, mais rien n’est moins sûr…
4k
Cette dénomination officieuse représente une résolution qui dépend essentiellement de votre interlocuteur. Dans le domaine de la TV, le 4k représente une résolution de 3 840 x 2 160 pixels, soit l’équivalent de quatre écrans Full-HD. Mais au cinéma, c’est une autre histoire. La dénomination couvre aussi bien des résolutions allant de 4 096 x 1 714 à 4 096 x 3 112 selon le format choisi par le réalisateur.
4k2k
C’est aussi une dénomination officieuse mais elle correspond exclusivement aux écrans de 3 840 x 2 160 pixels.
WQHD
Cette norme correspond aux écrans d’une résolution de 2 560 x 1 440 pixels. Elle est principalement utilisée en informatique, notamment sur moniteurs professionnels mais aussi sur les iMac 27 pouces.
Retina
Il s’agit d’une dénomination marketing Apple. Elle ne correspond à rien de standard, mais à une volonté du constructeur d’offrir une densité de pixel supérieure au pouvoir de résolution de l’œil humain, tout un programme. Ainsi, l’Iphone 5 dispose d’un écran de 1 136 x 640 pixels, le nouvel Ipad de 2 048 x 1 536 pixels et le MacBook Pro Retina de 2 880 x 1 800 pixels. Bref, ça ne correspond honnêtement à rien, mais c’est sans compter sur le pouvoir de conviction de la marque qui fait que la terminologie se répand désormais à d’autres marques pour désigner les appareils de très haute résolution.Il y a plusieurs raisons pour lesquelles la très haute résolution fait sens sur PC alors que la fameuse 4k ‘Ultra-HD’ ne présente qu’un intérêt marginal pour l’instant. La photo est bien entendu l’un des domaines qui bénéficie de ce gain de finesse. D’ailleurs, il ne faut pas se le cacher, l’écran de PC est à ce jour celui qui limite la résolution de nos photos et non plus l’appareil. Quand on y pense, à quoi bon acheter un appareil photo 24 Mpixels quand on ne peut voir ses images qu’en 2 Mpixels (1920 x 1080) ? L’utilisation d’un écran 27 pouces WQHD permet de réduire cette distance technologique et de découvrir les détails insoupçonnés de nos clichés.
Concrètement que gagne-t-on à passer en haute résolution ? Voici un exemple concret. Cette photo a été prise avec un Nikon D7000. Et l’image ci-dessous offre une résolution effective de 13MPixels, une fois convertie en 16/9 pour les besoins de l’essai. Voici l’image complète :
Si l’on zoome sur la branche des lunettes, on constate que la résolution de l’image est vraiment bonne.
Hélas, les écrans 13 Mpixels ne sont pas pour demain ni pour après-demain. Sur un écran Ultra-HD, voila ce que cela donnerait :
La dégradation est tout bonnement imperceptible et c’est vrai que lors de notre essai du Toshiba 55ZL2, la photo était sans doute ce qui nous avait le plus impressionné.
Voyons donc ce que deviennent ces détails sur un écran WQHD. Il y a une perte de définition évidente mais encore tolérable.
Sur un écran Full-HD, c’est déjà plus discutable.
Et sur un écran 720p, c’est tout simplement atroce.
Voilà pourquoi, lorsque l’on essaie un écran très haute-résolution, on a du mal à revenir à un modèle moins résolu.
La très haute résolution : les gamers d’abord
Ensuite, et bien que le jeu sur PC ait du plomb dans l’aile face à l’arrogance des amateurs de console de jeu, il faut aussi dire qu’à ce jour le meilleur rendu graphique d’un jeu quelconque est encore obtenu sur PC, quitte à relancer un troll vieux comme le premier jeu sur PC ! Et les amateurs le savent, cela fait plusieurs années déjà que l’on peut jouer sur PC en 2 560 x 1 440 voire en 4k, avec des titres comme Crysis 2 ou BattleField Bad Company 2 ! Et la tendance n’est pas prête à s’inverser. Sur PC, il y a donc bien du contenu à regarder en très haute résolution ! Il faut toutefois nuancer ce constat. En effet, il faut toujours disposer d’une configuration musclée au-delà du raisonnable pour pouvoir effectivement jouer dans ces résolutions extrêmes sur PC. La double carte graphique est votre ami mais votre banquier risque de ne pas apprécier.
Les tablettes ne sont pas en reste quand il s’agit d’afficher au-delà du Full-HD. Pour l’instant, seul le nouvel iPad présente une résolution de 2 048 x 1 536 pixels mais d’autres constructeurs pourraient lui emboiter le pas. Certains se posent à juste titre l’intérêt d’une telle résolution. Certes, l’interface est plus fine mais les vidéos ne sont pas compatibles. Il faut donc les remettre à l’échelle et une telle densité de pixel n’est pas exploitable en tant que telle sur une si petite surface. Au mieux, on bénéficie donc de contours plus léchés sur les applications. Pour autant, les jeux les plus sophistiqués qui s’affichent en très haute résolution sur l’iPad gagnent vraiment en finesse. Mais c’est encore la photo qui tire pleinement profit de cette résolution. Le paradigme est le même que sur PC. Mais on peut aussi utiliser une tablette comme viseur distant ! En effet, de plus en plus d’appareils sont compatibles WiFi et on peut utiliser une tablette connectée à l’appareil photo pour contrôler les conditions d’exposition et déclencher le cas échéant. Canon, Nikon et Samsung proposent des applications qui permettent de viser pour que l’appareil sur trépied ne bouge absolument pas. La très haute résolution est une aide précieuse dans ce cas.
L’Ultra-HD pour après-demain
Dans le salon, la très haute résolution passera donc par l’Ultra-HD, une dénomination désormais « Marketing-ready » du 4k plus ambigu. Les premiers appareils sont d’ores et déjà disponibles sur le marché, que ce soit en vidéo projection avec le Sony VPL-VW1000ES, ou plus simplement en télévision avec Toshiba et son fameux ZL2. Les autres constructeurs ont annoncé leurs modèles à l’IFA et on devrait voit débarquer leurs versions de la très haute résolution début 2013. Même si les démos technologiques sont toujours aussi impressionnantes, force est de constater qu’il n’y a pas de contenu ! La seule solution réelle consiste donc à brancher un PC sur le diffuseur en question.
Certes, les constructeurs arguent qu’en attendant, leur mise à l’échelle vers le 4k permet d’obtenir un résultat proche mais personne n’est dupe… surtout pas nous. Et à l’essai, on peut vous dire qu’il y a toujours une distance réelle qui ne justifie pas l’investissement pour l’instant. Surtout, il est étonnant de voir que personne ne se pose la question des canaux de diffusion éventuels en 4k. Ceux qui ont déjà essayé de regarder un film en HD et en streaming savent à quel point la question de la bande passante est cruciale. Pour l’heure, diffuser du 4k en streaming relève du fantasme. Reste là aussi la photo qui est vraiment impressionnante en 4k et qui permet de découvrir enfin sur grand écran ce dont votre appareil photo est capable mais ça fait cher le cadre photo.
Quelle connectique pour la très haute résolution ?
Deux solutions s’offrent à vous aujourd’hui si vous voulez diffuser des images en résolution supérieure au Full-HD. Sur PC, vous pouvez passer par le Display Port. Cette connectique présente sur les matériels professionnels et sur les produits Apple n’est pas très répandue. C’est pourtant le successeur officiel du DVI. Côté grand public, le HDMI semble être la voie royale. Officiellement, seule la version 1.4a permet de passer des résolutions jusqu’au 4k mais dans la pratique, on constate que c’est plus une limitation logicielle que physique sur les systèmes existants. Il faudra donc attendre les mises à jour de pilote avant de tout casser chez vous.
Changez, achetez, consommez !
Derrière cette nouvelle résolution qui débarque se cache aussi le spectre d’une industrie de la télé qui ne sait plus vraiment où elle habite, il faut bien le dire. Les fabricants de télé sont face à une réalité cruelle : non, les gens ne changent pas de télé tous les ans, ni même tous les trois ans. Oui, les gens se satisfont parfois d’un 22 pouces même pas Full-HD pour live-tweeter « Danse avec les stars ». Et non, tout le monde n’habite pas dans un appart de 200m2 permettant d’avoir assez de recul pour une TV de 150 cm de diagonale. Bref, c’est l’impasse. Le marché s’effondre, réellement. On annonce des chiffres de vente de -25, -29% cette année. Alors chez les constructeurs, on cherche, légitimement il faut bien le dire, le moyen de vous faire rêver. Et comme la 3D, tout le monde s’en fout, on mise sur l’ultra-HD avec des arguments qui vous font parfois dire : « nan, mais c’est mignon, hein, je ne dis pas, mais bon… ».
Par exemple, ceux qui misent tout sur l’ultra-HD en vous disant que c’est l’avenir sont les mêmes qui vous disaient que la 3D serait un carton, parce que la haute définition n’était pas un bénéfice aussi flagrant pour le consommateur que le relief. On vous explique aussi que l’Ultra-HD, c’est super bien, parce que ça vous permet de vous rapprocher encore plus de l’écran. Sous-entendu : « vous pouvez acheter un téléviseur plus grand, plus cher, pour votre tout petit salon, faites-nous confiance. » On oublie aussi les limites physiologiques qui imposent normalement la distance à l’écran pour éviter le stress oculaire du coup ? Vraiment, on peut le dire : « C’est mignon, votre truc, là… mais je vais attendre que l’on ait du contenu pour la ultra-HD au salon… vers 2015. »